[Event] Dans la grosse pomme

Partout autour de vous, les slogans pro-Kiras résonnent comme autant de leitmotiv. Il y a des gens de toutes les origines, de toutes les classes sociales. Impossible de deviner le passé, le futur de tous ces gens, aussi il est bien compliqué de comprendre pourquoi ils sont là et dans quel but ils supportent Kira.

A droite, un type brandit une pancarte "Justice démission !", à votre gauche ou sur les côtés, tous ces gens sont ici pour hurler, peut-être est-ce même la première fois de leur vie, qu'ils ne sont plus d'accord avec le système judiciaire japonais.

Trop de laisser pour contre, trop de morts collatérales : Kira leur a prouvé qu'un petit sacrifice pouvait sauver tout un peuple. Ils sont fiers de Kira, ils sont fiers d'avoir quelqu'un qui les représentent et compte sur aujourd'hui pour le crier, combien même cette manifestation dégénère.

Eux, ils seront les martyrs de quelqu'un.

Mello continuait son manège depuis ce malheureux incident au parc et séchait le lycée depuis. Derrière le dos de Billie Brave, la femme chez qui il logeait, il avait trafiqué son portable de manière à ce qu'elle ne reçoive pas les appels répétés du lycée. Il avait noué des relations avec les gens d'Uso et s'était retrouvé au plein cœur de cette manifestation, plus par désir de vengeance qu'autre chose.

L était mort. L était mort et ces gens s'en foutaient. Il n'y avait que Kira qui comptait pour eux : un infâme et lâche criminel. Quelqu'un de méprisant et d'abject.

Décidé à foutre le bordel, il sortit de son sac une grenade lacrymo, enfila un masque plus vite que la vitesse de la lumière et la fit rouler sur le sol.

Son monde devint fumée en peu de temps et il frappa la première silhouette qu'il croisa de toute la force de ses poings.

Il s’apprêtait frapper pour faire mal, pour blesser, pour heurter la première personne qui aurait le malheur de lui tomber dessus. La fumée était dense, mais toutefois, il savait qu'il y avait suffisamment de personnes ici pour que son poing atteigne sa cible.

Il le fit, certes, mais pas comme il le pensait à l'origine. Son bras se retrouva bloqué et il reconnut la voix de Billie qui lui demandait ce qu'il faisait. Son cœur bondit dans sa poitrine.

« A ton avis ? Je veux me venger ! Tu crois que je veuille faire quoi à des connards comme ça ? Ils ne méritent même pas de vivre ! »

Il avait déjà eu l'occasion de lui parler un peu, après la mort de L. Malheureusement, cela ne s'était jamais très bien terminé, lui ne cessant de crier et de s'offusquer. La dernière fois, il avait claqué la porte et dormi dans un squatt abandonné.

« Lâche-moi, t'es pas ma mère ! »

Mello aurait voulu s'enfuir en courant car, très honnêtement, voir Billie maintenant n'était pas dans ses souhaits. Il ne pouvait cependant pas s'enfuir là, maintenant, pour la bonne raison qu'il savait qu'elle le rattraperait un jour ou l'autre et qu'à ce moment-là, ce serait terrible.

« J'ai compris, tu sais ! », il ne cilla plus, ne tentant pas de l'empêcher de tenir son bras. « Et tu vas faire quoi ? On est en pleine manif' et ça se castagne de partout ? Alors, certes...j'y suis un peu pour quelque chose, mais tu pouvais pas attendre d'être sortie de là pour me le dire ? »

Il était heureux d'avoir le masque à gaz ou il aurait déjà été en train de pleurer toutes les larmes de son corps. Mello était toujours en colère contre Kira, mais déjà moins qu'il y avait quelques jours, lorsqu'il s'était effondré sur Matt. Il allait un peu mieux et avait digéré les quelques évènements qui lui étaient arrivés, mais ce n'était pas encore suffisant pour ne pas avoir envie de les frapper.

« Comment tu fais pour ne pas péter un câble après ce qu'il s'est passé ? L n'était rien, pour toi ? Tu travaillais avec lui, tu étais proche de lui ! Tu devrais faire comme moi ! »

Pour Mello, en réalité, ce n'était pas du tout le temps des discussion. Il sentait que Billie avait besoin de lui parler pour lui expliquer qu'elle l'aimait, qu'il n'avait pas à s'en faire pour son futur et même qu'elle trouverait quelque chose pour lui, mais elle ne comprenait pas.

Elle ne pouvait pas comprendre, en réalité. Déjà, de un, il n'avait pas envie de parler de ce sujet dans cette anarchie urbaine de sueur et de quolibets insultants et de deux, il avait grandi dans une atmosphère de compétition visant à devenir L. Une fois L mort, il ne restait que Near. D'ailleurs, dans son message, Roger avait été équivoque et ne lui avait laissé aucune place. Il avait fait tout cela pour rien, sacrifié tant de choses...pour pas grand intérêt.

Mello continuait cependant à croire que le combat contre Kira était digne d'intérêt, mais il voulait le mener à sa manière, comme lui édictait son instinct, ses tripes. Ce n'était pas son genre de suivre une nana au lycée, aussi intelligente fut-elle, encore moins de faire semblant d'être quelqu'un d'autre. Ça, Mello ne pouvait pas et il ne voulait plus le faire. Il ne comprenait même pas encore pourquoi il avait été choisi.

Bref, il s'apprêtait à répondre à Billie quelque chose de bien méchant :

« J'en ai rien à foutre de ta vie ! Si tu crois m'apitoyer parce que t'es orpheline, on l'est tous ici ! », sauf moi, pensa-t-il avec regret, ceci dit. « On l'est tous, ici, et on s'en porte mieux pour la plupart !!! »

Il allait continuer avec une tirade sur la violence lorsque le poing d'un manifestant lui arriva dans la figure. Il fut sonné pendant quelques secondes, trop surpris pour faire quoique ce soit puis se libéra de Billie, attrapa le « pauvre » homme et commença à le frapper.

Plus vite qu'il ne l'aurait voulu, Mello se retrouva totalement seul.

Seul dans la brume et seul dans les cris. Billie avait disparu si soudainement qu'il avait l'impression qu'elle avait été avalée par la foule.

Il sentit son cœur s'accélérer, et quelque chose en lui commencer à faire monter le volume de stress. Mello commença à bouger, à sa recherche. Pourquoi le faisait-il, d'ailleurs ? Il ne l'aimait pas tant que ça, elle était chiante et elle n'arrêtait pas de lui reprocher des choses ? Et pourtant, c'était comme s'il ne pouvait se passer d'elle.

Mello se détourna de sa cible et se dirigea vers l'endroit où il avait vu la jeune femme pour la dernière fois.

« Billie ? », cria-t-il pour couvrir le bruit qui les environnait. « BILLIE ??? »

Mello ne la voyait toujours pas et la cherchait sans réussir à l'atteindre. Au bout d'un moment, il crut entendre sa voix et se précipita vers elle, mais il fut interrompu dans ses mouvements par des silhouettes de manifestants.

Il heurta le corps de l'un de ces types et sans trop savoir comment, une bagarre se déclencha. Pas la plus petites des bagarres, il dut même en venir aux mains et finit par se prendre un coup de poing dans le visage qui fit tomber son masque.

Le gaz de la bombe lacrymo lui rentra dans les yeux et l'adolescent tomba à genoux. C'était une journée pourrie, il allait sûrement avoir un coquard le lendemain et il entendait les rixes tout autour de lui continuer. Il n'était pas assez puissant, pas assez imposant pour interrompre le conflit et l'air ambiant lui donnait envie d'étouffer.

"Billie...?"

Cela ne devait-il pas être une manifestation pacifique?
Enfin... pacifiste et anti-justice semblent être antinomiques, c'est à concéder...
La manifestation passait devant le magasin de fleurs, les ornements extérieurs avaient été rentrés afin d'éviter toute casse. C'est si fragile une fleur après tout.
Depuis les coups de feu sur la grand place à ce festival, j'avais refusé toute sortie. Pas que je voulais faire croire que le terrorisme avait l'effet escompté, mais que j'avais enfin une raison de ne pas aller dans des endroits bondés avec des gens incapables de vivre en société, tout juste bon à gérer leurs intérêts personnels.

Et là, la manifestation venait à moi... Soupir de désespoir... puis un sursaut. Une fumée épaisse commence à entrer dans le magasin par la porte d'entrée. Par réflexe, je m'approche de l'entrée pour fermer la porte quand il me semble distinguer une bagarre au loin. C'est n'importe quoi, c'est à sens unique.
La victime arrive toutefois à s'échapper et à s'éloigner d'eux, se rapprochant de moi. Ils ne vont surement pas s'arrêter là. Je tente d'être assez audible sans pour autant crier afin de ne pas attirer les assaillants vers moi.

- Hey, par ici.

La situation devenait n'importe quoi et Billie commençait à désespérer. Elle n'arrivait pas à trouver Mello parmi cette foule en délire. Elle avait beau hurler, mais aucune réponse.

Soudain, une bombe lacrymogène explosa. Son intuition lui soufflait d'y aller. Billie courut alors jusqu'à là-bas en essayant de se protéger du mieux qu'elle pouvait du gaz. Elle poussa, frappa, jusqu'à voir une tête blonde familière au sol.

- Mello !

Elle se précipita vers lui. Elle l'attrapa par l'arrière, au niveau des aisselles et le traîna hors de la zone gazifiée. Une femme leur fit signe d'entrer dans sa boutique. Billie en fut reconnaissante et traîna de nouveau Mello jusqu'à là-bas.

- Allez Mel, ressaisis-toi !

Il sentit quelqu'un le prendre par le bras et le tirer de cette foule menaçante. Mello avait le souffle coupé court, mais il reconnut les cheveux de Billie et ne se défendit pas. Il la laissa l'entraîner dans ce magasin, où il s'écroula sur le sol.

« C'est ma faute, putain ! »

Il avait encore les yeux pleins de larmes à cause de la lacrymo qu'il avait lui-même lancée...et la haine lui rongeait le cœur, la haine qu'il avait pour tous ces gens qui supportaient Kira. Il aurait voulu voir cette fille de Uso dès maintenant, faire quelque chose, il ne savait pas quoi, mais c'était déraisonnable. Déraisonnable car il devait se contrôler, parce qu'il était Mello et non un sbire capable de commettre le pire.

Lui avait un cerveau de génie, il devait réfléchir avec.

« On est où ? J'ai mal. »

Elle était vraiment heureuse que cette femme leur ait permis de se mettre en sécurité.

- Merci beaucoup, vous nous sauvez la vie. Auriez-vous des serviettes et une bassine d'eau ? Je vais en avoir besoin pour ses blessures et ses yeux.

Elle se doutait qu'elle en demandait beaucoup, mais elle devait s'occuper de Mello avant. Elle posa une main réconfortante sur la joue du jeune homme.

- Chut, reste tranquille, tu n'es pas en état de retourner là-bas. Moi si, j'irais pour essayer de calmer les choses. Je viendrais te récupérer lorsque ce sera fait.